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mercredi 25 décembre 2024
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Pour la présidence française du Conseil de l’UE, une étoffe en data-tissage

En janvier 2022, la France prenait la présidence du Conseil de l’Union Européenne pour six mois. À cette occasion, le projet artistique L’Étoffe de l’Europe, imaginé par l’agence d’architecture et de scénographie Adeline Rispal, et l’agence de design graphique Si | Studio irrésistible, a été déployé dans sept espaces des deux bâtiments du Conseil. Ces interventions scénograhiques, mises en lumière par Les éclaireurs, se fondent sur le concept du data-tissage : textile et numérique se lient pour donner à voir l’histoire de l’Union Européenne, de sa construction pays par pays, à la succession des présidences. Parmi les différentes créations, une fresque de data-tissage de 16 mètres de long, ainsi qu’une installation monumentale de 650 mètres carrés composée d’une structure en métal et deux ailes en papier et fibres de verre, sont à découvrir.

Du data-tissage au fil de l’histoire européenne

À chaque nouvelle présidence du Conseil de l’Union Européenne, les bâtiment de ce dernier font l’objet d’une nouvelle installation artistique. En janvier dernier, la France a ainsi inauguré le projet de data-tissage “L’Étoffe de l’Europe” créé par l’agence d’architecture et de scénographie Adeline Rispal ; Adeline Rispal et Marc Hivernat, et l’agence de design graphique Si | Studio irrésistible ; Jérôme Linigier et Nicolas Jacquette. Fondé sur la métaphore entre le tissage et le fil de la construction européenne comme long travail collectif institutionnel, le projet est composé de plusieurs interventions scénographiques dans sept espaces des deux bâtiments du conseil, pour un budget d’un million d’euros. Dans l’Atrium Justus Lipsus, large hall d’entrée et d’accueil, l’on découvre une installation monumentale de 650 mètres carrés. Celle-ci est composée d’une structure en métal louée à une entreprise d’événementiel et de vingt laizes en papier et fibres de verre proche du non-tissé et pesant 60 kilogrammes. Fixée à l’un des murs de la pièce, une grande fresque de data-tissage de 16 mètres de long par 3 mètres de haut, en soie intro-éclairée, se déploie aussi. Le design graphique de ces deux éléments, réalisé numériquement, s’inspire du tissage textile. Les fils de chaîne correspondent aux rubans des pays qui ont fait l’Europe depuis 1957, tandis que les fils de trame, composés à partir des mêmes rubans, concordent aux successions des États nominés pour la présidence tournante, changeant tous les six mois. 

“On s’est très vite rendu compte que si on voulait avoir un impact assez fort dans le hall, ça ne pouvait pas être du tissage à la main, étant donné la contrainte de coût et des délais”précise Adeline Rispal, architecte-scénographe et gérante de l’agence Adeline Rispal. C’est la raison pour laquelle les deux agences ont élaboré ce concept de data tissage numérique. Afin de déployer celui-ci, le studio de design graphique Si | Studio irrésistible a travaillé sur la mise au point des rubans des pays. Il a procédé à la création de certains, étant donné que plusieurs pays ne disposaient pas d’un design établi de ruban, comme Chypre. “On a demandé à chaque pays une validation diplomatique pour les rubans” affirme Jérôme Linigier, directeur associé de Si | Studio irrésistible et designer. Le data-tissage numérique a quant à lui demandé plus de 350 heures de travail en vectoriel, sur base Illustrator, et l’ensemble mobilise 37 couleurs Pantone.

“C’est aussi le nom “Étoffe de l’Europe” qui est très porteur et qu’on a créé, que l’on a déposé aussi. C’est devenu une véritable marque, réappropriée par des personnes de la présidence française, au moment de l’inauguration de l’installation. […] C’est toujours un pari réussi quand le client pour lequel on travaille se réapproprie les mots que l’on a employés” ajoute Jérôme Linigier.

Paravents tissés et vidéo numérique en dialogue

Ces installations sont complétées par les créations de deux artistes. La créatrice textile Jeanne Goutelle a ainsi tissé cinq paravents, composés de 18 panneaux, à partir de rubans de tissu bleus, blancs, rouges, rebus de l’industrie textile stéphanoise. Les paravents aux couleurs de la France, installés dans les salons de la présidence, entrent en résonance avec une moquette bleu nuit au sol choisie pour l’occasion, et des fauteuils du Mobilier National appartenant à la ligne Hémicycle et designés par Philippe Nigro. 

Dans l’espace d’accueil du bâtiment Juste Lipse, une création vidéo d’une heure de l’artiste Jacques Perconte prend place sur un grand écran LED de 4 mètres de large et de 5,5 mètres de haut. Celle-ci est composée de paysages européens, retravaillés par des compressions vidéos, se fondant les uns dans les autres, tel un tissage numérique. “On voulait introduire du numérique pour montrer que le tissage est une question actuelle”précise Jérôme Linigier. Cette installation est complétée par huit tirages numériques de 60 x 87 centimètres dont les images sont tirées d’une seconde création vidéo, incorporant des images d’oiseaux volant dans le ciel de Rotterdam.

Des ascenseurs aux bureaux : déclinaison du motif textile

L’Étoffe de l’Europe se déploie jusque dans les bureaux, avec des voilages aux couleurs de la France. Les parois intérieures des ascenseurs des deux bâtiments sont aussi habillées de larges autocollants vinyle aux designs uniques à la dominante de bleu, déclinés à partir du data-tissage initial. Enfin, une exposition, “Décors et paysages”, au commissariat assuré par Lola Meotti, rassemble six jeunes artistes français travaillant en Belgique. Leurs œuvres explorent des thématiques tels que l’écologie et l’urbanisme. “Nous avons voulu montrer comment l’Union Européenne se fabrique aussi par le déplacement d’artistes dans différents pays” affirme Adeline Rispal. 

À présent, l’agence Adeline Rispal et Si | Studio irrésistible travaille sur une gamme de produits dérivés, comme des parapluies ou encore des sacs aux couleurs et design de l’Étoffe de l’Europe. Les deux agences cherchent aussi des solutions d’upcycling pour que les 650 mètres carrés des laizes en papier et fibres de verre puissent être réutilisés, en concordance avec la démarche d’éco-responsabilité adoptée pour l’ensemble du projet.

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Isaline Dupond Jacquemart

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