Jusqu’au 10 octobre, la Bibliothèque publique d’information Centre Pompidou accueille l’exposition Chris Ware du bédéaste de renom. Le monde de l’Américain, nourri de références à l’imprimé, à l’architecture et au graphisme, prend place dans un parcours chronologique. De Quimby the Mouse, à Building Stories, en passant par Jimmy Corrigan, les trames narratives se déploient au sein d’une scénographie structurée et architecturale. Planches originales, objets graphiques, maquettes, exemplaires de bandes dessinées, ou encore enregistrements sonores explicitant les créations… Voici plusieurs des éléments présents dans cette rétrospective, élaborée en étroite collaboration avec l’artiste.
L’aventure de Chris Ware
Dès l’entrée dans l’exposition “Chris Ware”, nous plongeons dans un monde labyrinthique. Au plafond et au sol du vestibule, se trouvent une cosmogonie de la voûte céleste dessinée par le bédéaste, et une constellation de pictogrammes wariens. L’aventure de Chris Ware débute avec l’Acme Novelty Library. Cette série de bande dessinées est publiée depuis 1993 sous forme de comic book et dans des formats de plus en plus variés. Nourrie d’un humour caustique et de références à l’univers de la presse et de l’imprimé, elle inclut parfois de fausses planches de publicité, préfaces et postfaces. Aux murs de l’exposition, des planches originales aux traces de crayon bleuté invitent à découvrir les premiers personnages de l’artiste, développés au cours de cette première aventure éditoriale. Quimby the Mouse évoque l’histoire des toutes les souris de la bande dessinée. Jimmy Corrigan est un anti-héros hanté par son double fantasmé triomphant. Dans la deuxième salle de l’exposition, l’univers de Jimmy Corrigan, the Smartest Kid on Earth, ouvrage ayant popularisé l’artiste, se déploie. Figurines en plastique de ce personnage en quête d’un père, tout comme Chris Ware, agrandissements en couleur de pages de la bande dessinée et maquette originale présentée à l’éditeur de Panthéon Books, Dan Frank, intègrent une scénographie de l’agence Maciej Fiszer, aussi structurée que les planches.
De l’objet livre au livre-objet
Artiste du neuvième art, Chris Ware puise la complexité de ses créations dans sa maîtrise de l’imprimé, de l’objet livre au livre objet, du format à la mise en page, de l’impression au façonnage. “Je prends beaucoup plus de plaisir à fabriquer des choses qu’à les dessiner” affirme-t-il. Building Stories, roman graphique présenté dans la troisième salle de l’exposition, se présente sous forme d’un coffret en carton contenant 14 formats illustrés, tous différents. La rigueur du trait de Chris Ware, le complexité de la construction graphique et typographique de ses récits et son attrait pour l’architecture, font de Building Stories un espace aux multiples narrations, un monde qui s’organise sous le regard du spectateur et de la spectatrice. La maquette de l’immeuble et ses plans, créés par l’artiste inspiré par les boîtes mondes de Joseph Cornell, s’invitent dans l’exposition. Si Building Stories conte l’histoire d’un immeuble de Chicago, il est aussi, en l’absence de lien séquentiel évident entre les différents livrets, une histoire à (re)construire par le lecteur et la lectrice.
Florilège de récits parallèles
Grâce à ses découpages ludiques, Chris Ware fait cohabiter récits parallèles et multi-histoires. L’exposition se clôt avec des extraits de la série de 25 couvertures conçue par l’artiste pour The New Yorker. Commandées par Françoise Mouly, directrice artistique du journal et co-créatrice de la revue de bande dessinée d’avant-garde RAW, elles incluent chacune un lien avec la ou les précédentes. Si les histoires de Chris Ware sont souvent empreintes de mélancolie, elles sont ponctuées de traits d’esprit et se distinguent par une approche emphatique des personnages, qui rend les récits de l’artiste aussi sensibles qu’émouvants.