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jeudi 21 novembre 2024
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Spécimens, poinçons, matrices : plongée dans le fonds d’archives Ladislas Mandel

Aurélien Vret est artiste multidisciplinaire, créateur de caractères et chercheur associé à la Bibliothèque nationale de France. Lauréat en 2021 de l’appel à chercheur·euses associé·es de la BnF pour son projet “Pourquoi il est important de faire de la typographie contemporaine à la BnF, et ce que cela change pour l’avenir de la création artistique en général”, il étudie le fonds d’archives Ladislas Mandel, dessinateur de caractères né en 1921 et mort en 2006, qui a été légué à la BnF en 2007. Aurélien Vret s’intéresse aux spécimens du fonds, mais aussi à ses différents objets typographiques, comme des poinçons ou des matrices… Quelles fonderies ont produit les caractères que l’on retrouve dans le fonds Ladislas Mandel ? Quels ont été leurs histoires, leurs premiers usages – artistiques, politiques ou scientifiques ?

Le fonds Ladislas Mandel et la fonderie Deberny & Peignot


Chercheur associé à la BnF depuis 2021, Aurélien Vret étudie le fonds d’archives du créateur de caractères Ladislas Mandel. Né en 1921, Ladislas Mandel collabore avec le dessinateur de caractères Adrian Frutiger, puis devient, en 1955, chef d’atelier chez la fonderie Deberny & Peignot. Ladislas Mandel a conservé de nombreux documents  manuels historiques, spécimens, revues, épreuves  et des objets utilisés en imprimerie comme des poinçons et des matrices. Ce fond est légué à la bibliothèque de l’Arsenal en 2006. De nombreux éléments du fonds sont liés à l’histoire de la fonderie Deberny & Peignot, Ladislas Mandel ayant travaillé pour celle-ci. La fonderie Deberny & Peignot est créée en 1923 par fusion de la fonderie Peignot & Fils et de la fonderie Tuleu, Girard et Cie. Celle-ci produit notamment le Peignot et le Bifur dessinés par le graphiste Cassandre et l’Univers, imaginé par le dessinateur de caractères Adrian Frutiger. Le vaste catalogue de la fonderie est aujourd’hui possédé par Monotype. Il intègre, du fait d’une histoire complexe de l’entreprise de fusions avec d’autres fonderies, de nombreux caractères, comme l’Auriol, le Grasset, le Garamond…

Spécimens, poinçons, matrices…

Aurélien Vret étudie particulièrement les spécimens du fonds Ladislas Mandel, mais aussi les différents objets typographiques, comme des poinçons ou des matrices… “Ma recherche débute par un objet qui a été gravé ou frappé, comme des poinçons ou des matrices. À partir de ces objets, je cherche à faire le lien entre la personne qui a gravé ces caractères et la fonderie qui a frappé les matrices. Quelle fonderie a fait la production de quel caractère ? Quand le spécimen de tel caractère a-t-il été publié ? Quel a été le premier usage, c’est-à-dire la première publication réalisée avec le caractère ?” précise Aurélien Vret. À partir d’un spécimen, le chercheur peut rattacher un caractère à la fonderie qui l’a produit. Les poinçons et matrices peuvent aussi porter une identification permettant d’en retracer l’origine. Aurélien Vret s’intéresse aux alliages des objets typographiques et aux techniques industrielles qui permettent de fabriquer des caractères. En fonction de ceux-ci, il est en effet parfois possible de dater les caractères et d’identifier la fonderie qui les a fabriqués. “En connaissant la fonderie, je peux souvent déterminer le premier usage. Cela peut être une publication artistique, politique, religieuse ou encore littéraire…” ajoute-t-il.

Le Robur : création et premier usage

Au cours de ses recherches, Aurélien Vret s’est notamment intéressé au Robur et son premier usage. Créé en 1907 par le dessinateur de caractères George Auriol pour la fonderie Deberny & Peignot, le Robur est une écriture grasse tracée au pinceau, inspirée de l’art nouveau et d’un certain goût pour le japonisme. Le chercheur s’attache notamment à déterminer le premier usage de la typographie : une monographie publiée en 1907 sur le peintre et graveur Henri Rivière et écrite par Georges-Gustave Toudouze. George Auriol et Henri Rivière se retrouvaient régulièrement au cabaret parisien du Chat Noir à Montmartre et partageaient cet intérêt pour les arts graphiques japonais. Dans ce cabaret, George Auriol fait la connaissance d’Eugène Grasset qui l’a présenté à Georges Peignot, gérant de la Fonderie G. Peignot & Fils jusqu’en 1915. Le Chat noir est en effet un lieu où se constitue un prototype d’avant-garde : artistes, écrivains, décorateurs… Aurélien Vret s’intéresse ainsi aux passerelles existant entre les créateurs de caractères et le milieu artistique et s’interroge sur ce type de liens qui peut exister aujourd’hui. De nombreuses reproductions d’œuvres, et notamment des objets du fonds, sont aujourd’hui dans le domaine public, ce qui ouvre aussi pour les artistes de nouvelles possibilités de réutilisation, comme des collages et des montages numériques.

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Isaline Dupond Jacquemart

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