À ceux qui veulent bien, quelques instants, retirer le voile d’indifférence qui les préserve d’un accablement général (ou peut-être de rejoindre l’action), un constat s’impose: notre planète va… très mal… Scandale sur scandale, on assiste, souvent impuissants, aux révélations catastrophiques qui se succèdent chaque année: extinction massive de la biodiversité, mers de plastique, pics de pollution alarmants… la liste est longue. Si elles se vantent de leurs avancées en la matière, les politiques proposent encore des solutions bien trop timides pour faire face à notre double société de croissance (croissance économique, avec l’augmentation de la production pour modèle, mais aussi croissance démographique). Depuis les années 1970, plusieurs théoriciens du design ont appelé la discipline à se réinventer en intégrant la responsabilité écologique. C’est le cas de Victor Papanek, qui désapprouvait le design industriel, arguant que «lorsque la conception est simplement technique, elle détruit le contact avec ce qui est nécessaire aux personnes».
Plus récemment, Ezio Manzini, designer et professeur à l’École polytechnique de Milan, préconisait aussi une révolution de la pratique: «Passer d’une culture du “faire en l’absence de limite” à une culture du faire dans un monde limité appelle un changement profond qui implique l’ensemble des acteurs du système de conception, production et consommation*.»
Avec l’apparition de nouveaux lieux de pratiques (fablabs), ou de collectifs prônant davantage d’éthique, le monde du design objet a déjà entamé sa mutation. Le design graphique, quant à lui, balbutie encore à trouver sa voie. Depuis les matériaux utilisés, les questions de recyclage, de ressources locales, de rationalisation de la production, de l’écologie appliquée au numérique, la pratique est soumise à l’auto-questionnement de sa (ses) nécessité(s). Pourtant, des expérimentations récentes, et de nouveaux enseignements, émergent. Nous avons rassemblé dans ces pages quelques-unes de ces démarches qui, sans doute, en encourageront d’autres… Car, le designer, au coeur des processus de production, endosse la lourde responsabilité de son impact écologique.
PAR CAROLINE BOUIGE
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